Les marmites
Contes de Mollah Nasreddine
La Sagesse extravagante de Mollah Nasreddin

Les marmites

- Ma soeur ! Peux-tu me prêter une de tes marmites ? J'en ai besoin pour faire mon repas.
- Bien sûr, lui dit-elle, je vais te la chercher.
La voisine revint avec une marmite de taille moyenne qu'elle donna à Nasreddine.
Le lendemain, Nasreddine posa une petite marmite à l'intérieur de la première et frappa à la porte de sa voisine.
- Merci beaucoup, ma soeur. Voilà ta marmite, elle m'a rendu un grand service.
- Mais, Nasreddine, la petite n'est pas à moi
- Mais si ! La nuit, ta marmite a accouché d'une petite. C'est sa fille, donc elle te revient de droit.
La voisine se moqua de la crédulité de Nasreddine, mais fut contente de gagner une petite marmite.
Trois jours plus tard, Nasreddine frappa à nouveau à la porte de sa voisine.
Petite sœur, peux-tu encore me prêter une de tes marmites ?
- Avec joie, lui répondit-elle. Je m'en vais te prêter la plus grande et la plus belle.
La voisine espérait, en son for intérieur, récupérer une deuxième belle marmite.
Nasreddine prit la grande marmite, remercia sa voisine et rentra chez lui.
Deux jours passèrent, puis quatre, puis sept, sans aucune nouvelle de Nasreddine.
La voisine commença à s'inquiéter sérieusement.
Elle finit par frapper à la porte de son voisin.
- Petit frère, lui dit-elle, tu as oublié de me rendre ma marmite.
- Je n'ai point oublié, mais je ne savais pas comment t'annoncer la mauvaise nouvelle. En vérité, alors qu'elle accouchait, ta belle marmite est morte la nuit dans des souffrances abominables.
- Ne serais-tu pas en train de te moquer de moi, Nasreddine ? Où a-t-on entendu parler de marmite qui meurt ?
- Malheureusement, voisine, dans la vie, tous ceux qui enfantent meurent un jour. Tu as bien accepté que ta première marmite accouche, il faudra bien admettre maintenant que la seconde est morte.
Et Nasreddine garda la grande marmite.